A quelque cinquante mètres avant le feu coloré souvent éteint, il convient de couper dans le bois perpendiculairement à la chaussée.
Deux étangs ont été creusés dans les fagnes par la famille Sury propriétaire de l’Hôtel de Flandre à Spa (1) afin de se procurer la glaçe en hiver pour la période estivale.
Elle était conservée en glacière, sorte de cave bien enterrée aux murailles épaisses pourvue d’une faible aération, dont le couloir d’accès était colmaté de bottes de paille, ce qui permettait la conservation de la glace jusqu’en été. Cette forme d’exploitation dura encore après la disparition de l’Hôtel de Flandre en 1912 (2)
Ces deux pièces d’eau avaient une profondeur de 1,50m au maximum, pour permettre la prise rapide de la glace par temps de gelée. Le plus petit étang se trouvait au sud du plus important qui subsiste encore. Il a disparu dans l’aménagement du couloir d’accès au champ d’aviation. La trace de son pourtour est toujours visible sur le sol.
La Reine Marie-Henriette fit don d’une somme de 300 f. à Spa Attractions pour créer dans ce site la Promenade de la Belle-Vue. Spa-Attractions fit ouvrir un sentier sinueux serpentant dans les bruyères, distinct du chemin des tombereaux chargeant la glace pour les hôtels de Spa (2).
Pendant la guerre, étudiant à l’Athénée Royal de Spa, nous allions nous y baigner avec d’autres jeunes gens : Yvon Renson, Paul Lux, Paul Henrard, Wilfried Moens … L’eau peu profonde, habitée de notonectes et de larves de libellules, devenait vite boueuse après quelques brasses …
Nous nous souvenons avoir découvert la petite plante carnivore appelée Rossolis à feuilles rondes, l’herbe à la rosée, Drosera rotondifolia, dans la sphaigne en contre bas de la digue.
Le couvert forestier s’est hélas refermé sur ce lieu faisant disparaître la flore de la tourbière.
Un sentier courait sur la petite digue circulaire arboré de bouleaux, de pins et d’épicéas. La digue a été malencontreusement crevée après la guerres réduisant l’étang à l’état de marais.
Colmater la brèche dans le barrage, dégager le sentier de la Reine Marie-Henriette et le pourtour du point d’eau permettrait d’offrir aux touristes une promenade aisée d’accès, certes, mais offrant toutefois le dépaysement d’une nature péri-fagnarde sauvage.
En sus de son intérêt esthétique et entomologique comme lieu de reproduction des libellules, l’étang Sury présente une valeur historique comme témoin d’une activité humaine disparue : la production naturelle de la glace.
Louis Pironet.
(1) L.Pironet: L’hôtellerie spadoise dans les cartes-postales anciennes. Hist.Archéol. spadoises, déc.1989. p.153
(2) Spa-Attractions : Guide illustré des promenades pédestres. Brux. éd. A. De Boek, 1926. p.43, 44
L-Pironet : Rénovation des fontaines. Réalités n° 84, janv. 1990