Souvenirs du service des pompiers de la ville de Spa

Madame Claudine Spailier vous invite à découvrir quelques documents relatifs à l’histoire des pompiers de notre ville.


1910-1913

Cette carte a été envoyée par François Ledin, commandant des pompiers de la ville de la guerre 1914-18 jusqu’en 1941, à un cousin habitant en Amérique. On peut y voir le matériel « plus que rudimentaire » qu’utilisait alors le Services des Pompiers de la Ville. Sur la face, on peut lire : «  Spa Service d’Incendies » 1ers secours (agents –pompiers) – 2e section. Devant debout : M. François Ledin. Au dos, mon grand-père a écrit : Firebrigade of Spa 1913.

Manuscrit des 2 chansons

Manuscrit des 2 chansons


Chanson écrite pour la Sainte Barbe le 3/12/1910

Nous vous présentons le texte d’une chanson «  Le pompier de service » écrite par F. Ledin à l’occasion de la Sainte Barbe, patronne des pompiers, le 3 décembre 1910.

-Le pompier de service –

Le sapeur-pompier de service
sa lance en main, l’oeil vigilant
S’est installé dans la coulisse
Dans son coin derrière un « portant »
Il ne connait que sa consigne
Et ne craint pas la tentation
Sur son tabouret et calme et digne
Il fait en pain sa faction

Le sapeur pompier de service
Lance en main
Son pouce obstruant l’orifice
L’air malin
Bien embusqué dans la coulisse
Dans son coin
Rêve à quelque gentille actrice
à l’oeil mutin

La Sainte Barbe le 4 décembre 1937 à l’hôtel Terminus place de la Gare. Au premier rang, sur cette photo à l’hôtel Terminus, le 4 décembre 1937, on reconnaît M. Paës, échevin de la Ville de Spa entouré par M. François Ledin, commandant des Pompiers armés de la guerre 14-18 jusqu’en 1941, date à laquelle il démissionnera, car gazé le 18 mars 1918, il ne pouvait plus occuper le poste pour des raisons de santé. De l’autre côté de M. Paës, André Ledin, le fils de François. Victor Nizet, Joseph Sablon puis Henri Caris (1960) lui ont succédé. Au 2e rang, debout M. Lemoine qui travaillait au casino.

La Sainte Barbe le 4 décembre 1937 à l’hôtel Terminus place de la Gare.
Au premier rang, sur cette photo à l’hôtel Terminus, le 4 décembre 1937, on reconnaît M. Paës, échevin de la Ville de Spa entouré par M. François Ledin, commandant des Pompiers armés de la guerre 14-18 jusqu’en 1941, date à laquelle il démissionnera, car gazé le 18 mars 1918, il ne pouvait plus occuper le poste pour des raisons de santé. De l’autre côté de M. Paës, André Ledin, le fils de François. Victor Nizet, Joseph Sablon puis Henri Caris (1960) lui ont succédé. Au 2e rang, debout M. Lemoine qui travaillait au casino.


Le chef de poste avec prudence
Prend toutes ses dispositions
Pour activer la surveillance
Il fait des recommandations
N’abandonnez jamais la lance
Ayez toujours l’eau sous pression
Et le spectacle commence.
N’oubliez pas votre mission !

Ne quittez pas des yeux la scène
Observez surtout les dessous
Ma remarque n’a rien d’obscène
Pourquoi, sapeurs, souriez-vous ?
Car ces dessous, c’est un danger
Coins et recoins, trous et fissures
Si l’on tombait en tel brasier
Nul n’en sortirait sans brûlures !

Dans la cour de l’hôtel de Ville. Au premier rang le cinquième est François Ledin, le 7e M. Joseph Léonard bourgmestre de Spa (notamment durant la guerre 40-45). Entre eux ? Les autres ?

Dans la cour de l’hôtel de Ville.
Au premier rang le cinquième est François Ledin, le 7e M. Joseph Léonard bourgmestre de Spa (notamment durant la guerre 40-45). Entre eux ? Les autres ?


Voici l’officier de semaine
L’ai guilleret, pressant le pas
Il accomplit son « tour de scène »
Inspectant tout de haut en bas !
Puis le grand chef l’allure fière
A son tour parait en ce lieu
Jetant parfois un œil sévère
Sur quelque « plongeur » trop curieux !!

Pour terminer, messieurs, l’histoire
Le Patron et ses lieutenants
Adorent tous trois, c’est notoire
Théâtre et divertissements.
Ils connaissent le répertoire
Les actrices, les figurants
S’il leur manquait un accessoire
Ils le fourniraient sur le champ !

Une deuxième chanson «  La chanson du pompier » n’est pas datée mais devait très probablement avoir été composée pour cette même fête.

Et oui, nous sommes pompiers armés
Il ne faudrait pas qu’on y touche
Les malcontents sont alarmés,
Le plat n’etant pas pour leur bouche

Ah ! Ah ! Ah! Oui vraiment
DE s’amuser, c’est le moment.

L’Officier de …carton , naguère
Depuis que le Roi l’a nommé
Reprend l’idéal militaire
Qu’en son cœur il tenait caché

Devant l’hôtel de ville.  Matériel un peu plus sophistiqué ! Le 4e au 1er rang est François Ledin, mon grand père. Au centre, ne serait-ce pas M. Dauchot, au 2e rang avec un képi blanc, Adrien Paës ? Les autres ?

Devant l’hôtel de ville.
Matériel un peu plus sophistiqué ! Le 4e au 1er rang est François Ledin, mon grand père. Au centre, ne serait-ce pas M. Dauchot, au 2e rang avec un képi blanc, Adrien Paës ? Les autres ?


Ah ! Oui mon commandant
Pour être officier c’est ch… maintenant !

Nos p’its pompiers font c’qu’on veut
Ne boudant jamais la besogne
Ils ont le caractère heureux
Chez nous on n’connaît pas la grogne.

Ah. Ah. Ah oui Vraiment
Les pompiers sont toujours contents

Sapeurs de notre compagnie
L’heure de boire est arrivé
Loin de nous la mélancolie
L’heure du plaisir a sonné (bis)
Mangeons, buvons, faisons ripaille
Sainte Barbe nous le permet
En chantant ce petit couplet
Braves pompiers engageons la bataille !

Spadois(e)s, reconnaissez-vous un grand-père ou arrière- grand-père ?

Claudine Spailier.

Odyssée du Corps de Sapeurs pompiers en 1940

Manuscrit inédit de Georges Spailier (+)

Dès que l’alerte fut donnée, le vendredi 10 mai à 3 heures du matin, le Commandant du Corps de Sapeurs Pompiers, M. François Ledin fit rappeler tous les sapeurs et préparer le matériel. Lorsque l’invasion du pays fut connue, les armes et munitions furent enfouies dans un puits de la cour du quartier. Cette mesure dut être prise parce qu’aucun moyen de transport ne fut mis à la disposition du corps bien que réclamé depuis plusieurs semaines aux autorités qualifiées.

Le corps des sapeurs pompiers de Spa étant armé, des instructions avaient été données d’empêcher armes et munitions de tomber aux mains de l’ennemi et précisant aux sapeurs ayant des obligations militaires de ne pas se laisser capturer. Le commandant, bien que hors d’âge, avait reçu du bourgmestre l’autorisation écrite de partir avec les hommes. En outre, les instructions du Lieutenant-Général Lizin prescrivaient à M. F. Ledin, commandant également la Garde Civile locale, d’évacuer les gardes civils et d’emporter le matériel que la défense nationale avait mis à la disposition de la défense passive. Faute de camions, ce matériel resta à Spa. Seuls furent emportés les équipements individuels. L’effectif de la Garde Civile n’était pas suffisant pour occuper les postes prévus par le plan de défense. Les autorités ne prévoyant pas leur occupation avaient négligé d’étoffer le corps et même de prévoir les moyens de transport.

Pendant la matinée du 10 mai, les pompiers formaient une garde armée au Pouhon Pierre Le Grand où étaient recensés les étrangers suspects. Vers midi, M. Jos Léonard donna l’ordre de cesser toute activité. Que les hommes fassent disparaître leurs uniformes, dit-il, dans une heure les Allemands sont ici. Les archives furent alors mises en sécurité ou détruites et le commandant se mit en devoir de conduire les sapeurs-pompiers et les gardes civils à Liège ainsi que l’ordonnaient le règlement militaire et les sauf-conduits dont les hommes étaient porteurs.

Dans l’impossibilité de voyager réunis, chacun arrêta au passage autos ou camions. Le rendez-vous était fixé à Liège au poste des Pompiers de la place du Théâtre. C’est là que l’on vit arriver avec stupéfaction vers 14h15, l’auto-échelle du corps des pompiers spadois garnie d’une grappe de pompiers et de gardes civils. Abandonnée au quartier, sa présence à Liège était incompréhensible au commandant qui, s’informant auprès du conducteur, reçut la réponse suivante : « On nous a dit de prendre l’auto-échelle comme moyen de transport. »

L’arrivée de ce renfort d’hommes était attendue avec impatience à la caserne liégeoise. Nos pompiers et gardes civils assurèrent le service avec leurs collègues liégeois jusqu’au 11 mai. Dans l’après-midi de ce jour, ils étaient à Bruxelles où ils furent placés à la disposition du Comité de Défense Passive de St Gilles. Leur présence dans la capitale ne fut pas de longue durée. Les événements se précipitaient. Nos Spadois toujours groupés furent envoyés à Roulers où ils arrivèrent le 13 mai. Depuis leur départ de Spa et régulièrement par la suite, ils furent ravitaillés en vivres et en essence par les autorités militaires.

Le lendemain 14 mai, ils furent informés que le rassemblement des pompiers belges se ferait dans le midi de la France. Alors nos hommes entreprirent leur voyage vers le Sud. A Tourcoing, ils furent bien reçus – l’Armée Française les ravitailla à Abbeville puis à Rouen. Dans cette dernière localité, une réunion des chefs de groupes se tint à la préfecture où l’on apprit que des unités spéciales des pompiers seraient créées à Toulouse ou à Montpelier. A Caen, ils retrouvèrent leurs collègues liégeois accompagnés du lieutenant Brecoult et logèrent à la caserne du 8e régiment de ligne français.

A Toulouse, la caserne des pompiers était bondée, ils logeaient sur la paille à la fameuse Université vétérinaire où les avaient rejoints les sapeurs de Gand, Dinant, Anderlecht, Namur, Wavre etc avec leur matériel. Le 27 mai, l’armée française réquisitionna notre auto-échelle et 16 hommes pour monter la garde à la poudrière. Le lendemain, l’annonce de la capitulation de l’armée belge fit abandonner ce projet mais l’auto-échelle fut conservée.

Après de nombreuses visites aux autorités, notre corps de sapeurs fut dirigé vers Montpellier où le 31 mai ils logèrent à la salle Tinel. Ils subirent le même sort que les réfugiés, dormant sur la paille, vivant d’une croûte de pain, fournissant quelquefois un effectif de police pour la surveillance des locaux. Invités à trouver un emploi en attendant des instructions sur leur sort futur, ils se dispersèrent le 7 juin dans les villages environnants. Après de nombreuses démarches, 14 pompiers réussirent à être versés dans un régiment pour être pris en force. Le commandant Ledin fut mis à la disposition d’un poste médical dirigé par un médecin luxembourgeois et il assura ses fonctions à titre bénévole.
Le 10 juillet, les corps de police et de pompiers furent informés que le gouvernement de Belgique les réclamait. Le groupe de Montpelier se procura des camions et chacun versa son obole pour acheter l’essence nécessaire au retour. Mais le départ fut interdit. Le retour cependant ne devant pas tarder, le Ct Pauwels SA/2A de Puéchabon tint à remettre au corps spadois un certificat élogieux contresigné par le maire attestant le dévouement avec lequel nos pompiers s’acquittèrent de leurs fonctions. Signalons à ce sujet que, pendant plusieurs semaines, le sapeur Wittvrouw, clairon de corps, remplit sur demande du maire, les fonctions d’appariteur municipal.
Petit à petit, chacun reçut son ordre de mission et rentra au pays par ses propres moyens. Le commandant F. Ledin resta seul à Toulouse afin de veiller à la bonne conservation de l’auto-échelle. Devant la pénurie d’essence, il réussit à acheminer la voiture par voie ferrée. Après quinze jours de démarche quotidienne, il eut enfin la joie de la voir partir. Ce bien de la communauté en sûreté, le commandant à son tour prit le chemin de Spa. A son retour, il signala immédiatement aux autorités que l’auto-échelle se trouvait en sécurité à Compiègne.
L’absence de l’auto, dont le départ ne fut pas ordonné par le commandant Ledin, ne fut pas préjudiciable à la ville. La moto-pompe, huit cents mètres de tuyaux, l’ancienne grande échelle étaient restés à Spa et auraient suffi à combattre l’incendie. Les démarches furent entreprises sans tarder pour faire réintégrer son garage à la « vagabonde ».

Le 27 septembre 1940, la Kommandantur de Compiègne fait savoir que l’auto-échelle ne peut être acheminée vers la Belgique parce que sa hauteur sur le wagon dépasse le gabarit. Le bourgmestre charge le commandant de faire le nécessaire pour la ramener. Le 28 septembre, celui-ci se rend à la Kommandantur de Verviers pour y remplir les formulaires exigés. L’autorisation doit être délivrée par la Kommandantur de Liège et validée à Bruxelles et il s’écoulera encore quelques jours avant de pouvoir accomplir cette mission.

Ces quelques jours sont devenus des mois, ce n’est en effet qu’au début de février 1941 que parvint l’autorisation. Le 6 février, le commandant Ledin en compagnie du sapeur Optbinda, entreprit le voyage fertile en aléas et mena à bien la tâche qui lui était confiée. Ce fut avec un sourire de satisfaction que le commandant et son aide descendirent de l’auto devant l’hôtel de ville, le 10 février 1941, accueillis par le bourgmestre qui leur adressa des félicitations. Ajoutons que la voiture est en excellent état et pourra immédiatement être apte à remplir son rôle.

Terminons en confirmant que le commandant n’était pour rien dans l’exode de l’échelle en mai 1940. Il s’est efforcé, dès qu’il en eut connaissance, à mettre tout en œuvre pour la sauver et la ramener au pays.

En 1941, l’administration communale imposant la pension au commandant Ledin prit en même temps la décision de supprimer le corps de pompiers armés et de se contenter d’une brigade de 16 hommes sous la direction du lieutenant Nizet. Le gouverneur de la province, malgré l’opposition de la loi, approuvera cette décision ministérielle datant de décembre 1941, rétablit la compagnie de sapeurs pompiers et ajouta aux communes de la Reid, Sart et Francorchamps déjà sous la dépendance de Spa, les communes de Theux et Polleur.


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