L’occasion pour nous de rapeller aux plus âgés et de présenter aux plus jeunes ce que fut cette ligne créée en 1907 et dont la concession fut accordée par arrêté royal du 30 mai 1908. Le succès touristique de Spa et le développement des installations hôtelières de Balmoral firent qu’un promoteur local du nom de GIHOUL lança l’idée d’une ligne de tram entre ces 2 localités.
« Le succès touristique de Spa et le développement des installations hôtelières de Balmoral firent qu’un promoteur local du nom de Gihoul lança l’idée d’une ligne de tram entre ces deux localités. Cette excellente initiative devait permettre à un bon nombre de villégiateurs d’accéder commodément au lieu-dit « Balmoral ». Celui-ci, juché sur sa colline, à quelque trois kilomètres de Spa, s’avérait être non seulement un domaine touristique doté d’hôtels luxueux et nanti d’un terrain de golf de classe internationale, mais aussi un point de départ pour de nombreuses promenades vers les bois de Spa, la Hoëgne et les Hautes Fagnes, toute proches. Il fut alors envisagé de poursuivre la ligne jusqu’à la Hoëgne et Polleur, et, de là, de rejoindre Verviers en se raccordant à Heusy, à la ligne nouvellement créée des Tramways Verviétois. »(1)
La section de Spa (Gare) à Balmoral (Bois de Spa) fut ouverte à la circulation des trams électriques le 3 août 1909 tandis que se terminait la pose de la voie en direction de Heusy. Deux locomotives à vapeur, quatre remorques ouvertes (baladeuses) et quatre motrices électriques constituaient le matériel roulant au début de l’exploitation. Entre août 1909 et mai 1911, toute la ligne entre Spa (Gare) et Heusy (Tramways Verviétois) est mise en service électrique. A partir du 12 avril 1912, le terminus se situe place Verte, à Verviers.
Au cours de la première guerre, la région spadoise est décrétée zone militaire en raison du séjour du Kaiser au château du Neubois : dès lors, le tram subit les fantaisies tracassières de l’occupant qui en modifie arbitrairement le parcours dans l’agglomération verviétoise, s’ingérant même dans son exploitation, pour une période heureusement écourtée par la fin des hostilités.
A Spa, les Allemands posent une voie pour desservir directement l’établissement des Bains avec la tourbe. La guerre terminée, cette voie sera démontée. Le vicinal venant de Spa atteindra la gare centrale de Verviers en mai 1930 suite à une convention de pénétration passée entre la S.N.C.V. et les Tramways Verviétois.
Le dépôt, heureusement situé à Tiège, en bordure de la route dans un site agreste, est très largement conçu : il comporte 7 voies sous abri, des locaux pour la forge et le bobinage, un magasin. A l’entrée du gril, un immeuble administratif en style rustique de l’époque sert d’habitation au directeur et comporte salle de garde et bureau. Le dépôt se complète par une lampisterie et un château d’eau pour la distribution intérieure.
Différents types de motrices circuleront sur la ligne ; la majorité des remorques (dites baladeuses) étaient ouvertes, deux remorques fermées prélevées sur le réseau de Liège les rejoignent après 1944. On relève aussi la présence de 2 fourgons mixtes (compartiment voyageurs – compartiment pour les bagages). En 1936, la ligne est dotée de motrices originales : les huit » panoramiques » montées aux ateliers de la F.N. à Herstal, à partir d’éléments de trolleybus en construction, à l’époque, pour les Tramways Unifiés de Liège. Dès 1940, ces voitures sont utilisées en permanence. En 1942, le temps de parcours entre Spa Station et Verviers gare centrale est de 1 heure 10′. Il existe des services de messagerie, composés d’une motrice ancienne et d’un fourgon, circulant les lundis, jeudis et samedis et acceptant des colis jusqu’à 100 Kg.Au lendemain des hostilités, le succès toujours grandissant de l’automobile modifie la conception habituelle du tourisme de naguère. A l’instar d’autres villes balnéaires, Spa subit le contrecoup de cette nouvelle vogue qui amenait surtout une clientèle de passage et ce, au grand dam des hôteliers. Parallèlement, le Spa-Verviers vit fondre progressivement sa clientèle et malgré divers aménagements en vue d’améliorer les relations (rénovation du matériel, renouvellement des voies, installation d’une signalisation lumineuse automatique…), le compte d’exploitation va se clôturer par un déficit de plus en plus important.
La ligne est irrémédiablement condamnée le 30 juin 1952. Le dernier départ de Verviers fut assuré par la motrice 9163 à 21h10. Le tram est remplacé par des autobus basés à Balmoral d’abord, ensuite par ceux du dépôt d’Eupen. La plupart des véhicules sont mitraillés sur place à l’exception de 3 » panoramiques » qui passent à Liège (St Gilles) avec 2 motrices type » Energie » destinées au service » Voies et Travaux « . Le dépôt de Tiège est cédé à l’administration des travaux publics.
» Cher petit tramway Verviers-Spa, que de délicieux souvenirs tu laisseras derrière toi « . Ainsi s’exprimait un amoureux de cette ligne dans un article paru dans la revue » Rail et Traction » en juin-juillet 1952. C’était il y a un demi siècle.
J. EVRARD-ANGLEUR
Bibliographie :
(1) » Rail et Traction « , juin-juillet 1952, n°19, ABAC – La ligne vicinale Spa-Verviers dans » Présence du tramway « , 1973, n°44/45, AMUTRA – Les Tramways au pays de Liège, tome 2 : les vicinaux, édition du G.T.F.