Au 19e siècle, le village de Nivezé se résumait à quelques fermes et maisons éparpillées le long des chemins, dans une campagne encore fort présente. Il n’y avait pas, comme à Sart ou à Creppe, un habit concentré. Quelques maisons chemin du Cu du Pré (actuellement avenue Jean-Baptiste Romain), quelques autres rue Pré Jonas, une seule à l’entrée de la voie Maron (le chemin Maron actuel), quelques maisons près du chemin du Fond Gonet, quelques autres encore près du « Trô àl måle air » (situé à l’intersection de l’avenue Fernand Jérôme et de la rue Large Voie) et enfin quelques fermes isolées. D’ailleurs, le centre du village était difficile à définir.
Voici quelques anciennes fermes représentées sur des aquarelles et des peintures.
En général, la ferme nivezétoise de la moitié du 19e siècle est toute en longueur, c’est d’ailleurs une des caractéristiques de la maison rurale de cette époque. Sous un toit unique sont réunis côte à côte : le logis, l’étable et la grange avec un accès interne d’un bout à l’autre. Le climat local explique à lui seul cette configuration ; quand l’hiver sévissait, mieux valait ne pas sortir pour soigner le bétail. Le paysan construisait sa demeure avec les matériaux disponibles in situ : l’argile du coin, la paille du seigle cultivé, le chêne de la forêt voisine, les pierres de l’endroit, l’ardoise du pays et la brique souvent façonnée sur place.
Jusqu’au 19e siècle, les murs des maisons rurales sont construits en bois, les colombages sont remplis de torchis composé de terre glaise et de paille, les toitures sont réalisées en chaume. Le tout est construit sur soubassement en pierres. Mais ces matériaux ont souvent fait la part belle au feu. En septembre 1860, la ferme de Thomas Sody est ravagée par un incendie, en mars 1861 c’est celle d’Antoine Piron (elles étaient situées chemin du Cu du Pré). A partir du 19e siècle, la brique remplace le torchis dans les colombages. Si le terrain est argileux, les briques sont réalisées sur place. Puis, de plus en plus, les maisons sont construites en pierres du pays, les murs d’une épaisseur de 50 à 70 cm d’épaisseur donnaient une température relativement constante à l’intérieur. C’est aussi durant la seconde moitié du 19e siècle que le chaume est remplacé par des plaques de schiste appelées « cherbains » (le dernier toit du village recouvert de cherbains se trouvait, jusqu’il y a peu, derrière le restaurant « Aux Campinaires ») ou par des tuiles moulées et cuites par les briquetiers de l’époque. Certaines maisons présentent, dans le prolongement des façades, des moellons en créneaux sur deux des angles des pignons. Cette particularité architecturale, dénommée « S’i plêst-a-Diu » (S’il plaît à Dieu), encore visible sur deux bâtiments à Nivezé, n’est pas une fantaisie ; cela signifiait que, si un jour on avait de l’argent, on pourrait agrandir la maison, car ces pierres en saillie permettront un ancrage solide des deux constructions.
En général, la maison villageoise est sobre, cependant certaines possèdent des enjolivements : une petite potale avec une Vierge, des clés d’ancrage, … Ces ancres n’ont pas qu’une fonction d’enjolivement, elles relient la maçonnerie à une poutre voisine ou à une barre de fer reliant les murs parallèles afin d’éviter que les murs s’ouvrent.
Jean Lecampinaire
Sources :
La maison rurale traditionnelle de la région de Spa (J. Laurent – Editions « Nos r’prindans rècène » – 1991)
Monographie Géographique « La commune de Spa » (F. Cerfontaine – 1994)
Spa : Rapports communaux de 1860 et 1861 (Fonds Body)