Une utilisation inhabituelle de l’eau de Spa !

En 1760, paraissait à Berne un ouvrage extrêmement célèbre du non moins illustre médecin Samuel-Auguste Tissot : « De l’onanisme », où était violemment pourfendu le « plaisir solitaire ». En plus de 200 pages, notre bon professeur passait en revue toutes les méthodes susceptibles de mettre fin à ce dérèglement moral : bouillie de froment, décoction, lait d’ânesse, viande de cochon fumée,… Tous remèdes, en réalité, laissant peu d’espoir de guérison … hélas!

Sauf un. Et bien de chez nous, puisqu’il s’agit, tout simplement, de l’eau de Spa ! Eh oui ! Dans les pages 156, 157 et 159 de la réédition de l’ouvrage (1), il est bien précisé que le « meilleur remède, ce sont les eaux martiales » (mars est le nom du fer, pour les alchimistes) « préparées par la nature, et surtout les eaux de Spa, l’un des plus puissants toniques qu’on connaisse ».

« Le mars est un troisième remède, trop employé dans tous les cas de faiblesse, pour qu’il soit nécessaire d’insister sur son efficacité comme fortifiant; comme il n’a rien d’irritant, il est extrêmement approprié à nos malades. On le donne ou en substance, ou en infusion; mais la meilleure préparation, ce sont les eaux martiales préparées par la nature, et surtout les eaux de Spa; l’un des plus puissants toniques qu’on connaisse, et un, tonique qui, bien loin d’irriter adoucit tout ce que les humeurs peuvent avoir de trop âcre. Les gommes, la myrrhe, les amers, les aromates les plus doux sont aussi d’usage. Ce sont les circonstances qui doivent décider sur le choix entre ces différents remèdes. Les premiers que j’ai indiqués méritent généralement la préférence, mais il peut se trouver des cas qui en exigent d’autres : on peut en général les choisir dans toute la classe des nervins. C’est une maladie de nerfs, on doit la traiter comme telle …

Un grand avantage des eaux de Spa et du quinquina, c’est que leur usage fait passer le lait. Les eaux de Spa partagent cet avantage avec quelques autres eaux. L’on a vu que M. Hoffmann ordonnait le lait d’ânesse avec un tiers d’eau de Selter. M. de la Mettrie nous a conservé une belle observation de M. Boerhaave. Ce duc aimable, je traduis mot à mot, s’était mis hors du mariage; je l’ai remis dedans par l’usage des eaux de Spa avec le lait … »

Voilà sans doute pourquoi, de mémoire de confesseur, la masturbation est si peu répandue dans notre belle région … En tout cas, à l’heure où le thermalisme cherche son second souffle, voilà peut-être une voie (si j’ose dire) à explorer ?

(1) Samuel-Auguste Tissot : L’Onanisme : éditions de la différence.


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